17 September 2006

L'opération (suite 11)

On a beau se dire que tout ira bien, on en est pas moins angoissé, les imprévues ne sont jamais écartés à 100% et personnellement, je pense qu'en matière d'opération, le risque zéro n'existe pas. Je me dis que des impondérables tels que choc anaphylactique à l'anesthésie ou autres médicaments possibles administrés pendant l'opération peuvent parfois survenir dans certains cas, puis après j'essaie de me calmer en me disant que j'ai trop une imagination débordante à force de voir « Urgence » à la télé !        

Je scrute de temps en temps la porte de la salle d'opération par la porte donnant sur la galerie intérieure d'où est sorti l'anesthésiste en poussant la civière.  A 14h00 pile au moment où je regarde par la porte pour la troisième fois, je vois je vois la civière qui sort de la salle d'opération. J'aperçois maman parfaitement immobile sur la civière mais l'attitude très calme de l'anesthésiste et de l'infirmière qui va avec lui me rassure.

- La voilà qui sort, dis-je pour les personnes à l'intérieur.

Voilà que soudain trois têtes regardent en même temps par la porte, en l'occurrence moi, ma sœur et mon beau-frère.

Quelques secondes après, on ouvre grand les deux battants afin que la civière puisse entrer sans encombre.   Ma sœur est vraiment très atterrée en voyant maman les yeux clos, la bouche à demi-ouverte et sans réaction. Moi je regarde tout de suite si elle respire, sa poitrine se soulève doucement, ouf !

Une fois de plus au moment où l'on va soulever maman pour la mettre sur le lit, l'anesthésiste dit aux hommes de sortir. Mon beau-frère et moi sortons et à ce moment j'aperçois le jeune chirurgien italien sortir le premier du bloc tout en enlevant son chapeau chirurgicale puis sa blouse blanche, l'air harassé avant de tourner dans le couloir de gauche, et il y a de quoi : voilà depuis 8 heures du matin qu'il y est entré et il n'en sort qu'à 14 heures et quelques, il est non seulement fatigué mais a faim aussi !

Dès que les deux hommes sont repartis avec la civière, non pas sans nous avoir dit de garder notre calme, qu'elle dort et qu'on doit la laisser dormir, qu'elle se réveillera toute seule, nous retournons dans la chambre. Maman est déjà sur le lit dans un sommeil qu'on imagine sans peine très profonde, la perfusion et encore sur sa main droite.

Quelques minutes après, elle bouge un peu la main que ma sœur tienne afin qu'elle garde sa perfusion en place. Peu après elle continue de bouger imperceptiblement, tout ça s'est bon signe.

J'essaie de voir sa jambe qu'on vient d'opérer mais elle est sous une bande de tissu aérée beige qui arrive très haut et qu'on a tourné plusieurs fois autour. Maman continue de bouger imperceptiblement, l'anesthésiste a remis à ma sœur pendant notre absence son dessous qu'on a retiré avant l'opération afin de ne pas gêner et d'être tâché car il y avait une veine reliée aux varices jusque sous l'aine droite que le chirurgien a sectionné.

A 16 heures elle dort toujours, on commence à se demander quand elle se réveillera, pour Hary elle s'est réveillée dans la demi-heure qui a suivi son retour dans la chambre. Bon je me dis qu'il ne faut pas trop comparer, Hary est jeune et maman aura bientôt 70 ans dans trois ans, la faculté de récupération n'est pas la même.

Vers 16h 30 je sors pour souffler un peu après tous ces angoisses, je rencontre le Dr Seheno avec laquelle je cause un peu à propos de cette opération. Elle me dit que c'est le jeune chirurgien italien en personne qui a procédé à l'opération et que beaucoup des médecins qui étaient là suivaient la démonstration qu'il accompagnait d'explication et que le Dr Roger traduisait en même temps. Tous sont venus en stage pour approfondir leurs acquis et aussi d'autres techniques chirurgicaux. A ma question elle a répondu que oui le Dr Mario y était effectivement accompagné d'autres venus d'Antananarivo. Je lui demande le nom de ce jeune médecin et elle dit quelque chose comme Vincente ou Vincenze.

A ma remarque sur la précocité de ce chirurgien, elle répond qu'en effet, il a étudié spécifiquement la branche de la chirurgie veineuse. Le problème vasculaire est donc une spécialité pour lui.

Je retourne peu après dans la chambre et lit un peu en attendant le réveil de maman, cette fois je suis plus concentré pour lire, lol ! C'est ainsi que j'apprends que la série des voitures TAJ de la province d'Antananarivo est déjà bien entamée, que les séries ne durent plus que 7 ou 8 mois, 9999 véhicules immatriculés en 8 mois ! D'après le journal il n'y a que 8% de voitures neuves dans tout ça et bon nombre sont des occasions de La Réunion ou de l'Europe, surtout des pays de l'est. Pas étonnant si Tanà est dans des embouteillages monstres avec ses 260.000 véhicules en circulation (pour 2 millions d'habitants) ! Il n'y a pas de métro pour désengorger ça et le tramway prévu n'est pas encore en place. Un autre article plus accrocheur a été le tourisme, 278.000 touristes en 2005, il y a une augmentation d'environ 12% Mais c'est encore très peu par rapport à Maurice ou la république Dominicaine qui flirtent avec le million de visiteurs.

Je repose mon journal pour voir notre malade, elle n'est toujours pas réveillée et il est déjà 17 h 30 mn.

Je me pose la question quand on passe le malade en salle de réveil et quand on le laisse se réveiller tout seul.

A 17h 40 le Dr Misa passe et dit à maman en lui tapotant un petit peu les joues pour voir si elle est consciente:

- Madame, est-ce que vous êtes réveillées ?

Maman bouge un peu dans son sommeil. Ca va dit le Docteur, je pense qu'elle ne va plus tarder à se réveiller. Cinq minutes plus tard le Dr Roger passe et le même manège se passe :

- Est-ce qu'on est déjà réveillée madame Line ? dit le docteur tout en lui tapotant les joues. Ma mère acquiesce un peu tout en dormant et gardant ses yeux fermés.

- Ca va, tout va bien, elle va bientôt se réveiller.

A 18 heures je descends au village prendre les effets prévu, je passe d'abord acheter 2 mètres de toiles PK chez Rafily, la toile est bien large. J'achète en même temps une plaquette de Nivaquine car j'ai un peu de fièvre, ce n'est surtout pas le moment d'avoir le palu. J'y revois le docker déjà un peu pompette qui vient me saluer avec la main et qui continue de me sourire en me demandant si je vais bien, je lui réponds poliment mais sans plus. Je pense qu'il a envie de me demander des cigarettes ou de l'argent mais qu'il n'ose pas. Ce n'est pas la première fois qu'il m'arrive des choses pareilles : un homme me sourit très chaleureusement tout en me saluant comme si on ne s'est pas revu depuis quelques temps, le temps de me demander où est-ce que je l'ai déjà vu, il me demande déjà quelques cigarettes ou un peu d'argent comme 1000 francs (7 centimes d'euro). Comme je ne fume pas je lui donne un billet de 1000 francs tout en continuant de me poser la question où est-ce que j'ai bien pu rencontrer ce mec auparavant. Lorsqu'il s'en va et après moult réflexions, je me rends bien compte que je ne l'ai jamais connu auparavant ! A la limite je l'ai déjà aperçu une ou deux fois dans la rue et c'est tout, d'où cette impression de déjà vu. Après deux ou trois coups comme ça on ne m'y prend plus, en fait c'est un moyen comme un autre pour ces chômeurs de se faire un peu d'argent, enfin il vaut mieux ça que de les voir faire le pickpocket ou des vols à la tire.

Mes emplettes finis après y avoir ajouté une bouteille d'eau pour ma sœur qui est resté là haut à l'hôpital, je rentre à l'hôtel. Là l'hôtelier me remet les affaires de ma sœur et son mari qu'ils n'ont pu les faire entrer dans la chambre car j'ai emporté la clé du cadenas. Je vide mon sac de voyage en toile camouflage puis y mets la toile P.K, deux couvertures et deux draps, la bouteille d'eau et des bougies puisque ce sera notre tour de les allumer aujourd'hui puis je reviens à l'hôpital.

A 18h50 il fait déjà nuit noire et maman dort toujours. Je décide de rentrer enfin car c'est ma sœur et son mari qui vont dormir à l'hôpital garder notre malade. Ils vont se relayer durant la nuit.

Je décide de rentrer, je croise dans la cour le père Jean-Claude, un ami de mon beau-frère. Il est venu avec sa grosse moto et d'après ses explications, les parents d'un enfant de 6 mois dans le service de pédiatrie vient de faire appel à un prêtre pour faire le baptême de leur enfant très malade. L'enfant est dans un état désespéré me dit-il. Il me propose de me ramener avec sa moto au village, ce que j'accepte volontiers. Je me mets derrière sa moto et sur le chemin nous croisons le Dr Roger que nous saluons, il nous répond tout en nous suivant du regard, une cigarette gauloise aux lèvres. Je pose une question au prêtre qui me dit qu'il vient juste de rentrer d'une tournée dans les villages alentours. Il a pris son poste ici depuis un an et il seconde ici le père Richard qui avait aussi auparavant un poste à Ihosy.

Le père Jean-Claude m'invite au bar de l'hôtel pour une bière mais je décline son invitation puis je le remercie de m'avoir ramené, je le laisse donc descendre sa bière tout seul et passe à côté passer la commande de mon repas. Après avoir mangé je demande comme toujours de l'eau à Zanà pour me laver les mains, les dents et les pieds, non sans avoir utiliser auparavant mon fil dentaire. Je suis un adepte du fil dentaire avant chaque brossage car j'ai bien remarqué que les brosses n'arrivent pas à tout désincruster. Après ma toilette je passe au bar dire un au revoir au père et rejoints ma chambre. Le jour de notre arrivée nous l'avons déjà aperçu au bar devant une bière, il passe donc le temps ici de temps en temps.

Arrivée dans la chambre je me prépare tout de suite à dormir, tout en me déshabillant je me pose la question quand est-ce que maman va enfin se réveiller de son profond sommeil.

(A suivre)

P.S: Désolé pour le très long retard de la suite à cause de la gaffe de la part de Telma.

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