Face à cette alerte je me dis : Pourvu que René soit déjà arrivé à lhôpital ». Je demande un seau deau à Zana pour me laver avant daller rejoindre ma chambre. La bonne sempresse de donner leau voulu car elle veut vite rentrer chez elle en entendant cette alerte.
Lundi 31 Juillet 2006 :
Au réveil, je me dis quaujourdhui cest le grand jour de la rentrée à la maison. René arrive peu après et je lui demande sil a entendu lalerte de la veille.
- Oui, me dit-il, jétais à 100 mètres de la grille lorsque jai vu quelque chose bouger dans un fourré sombre qui descend vers la vallée, jai bien regardé malgré la lumière qui faisait défaut à cet endroit et jai vu lombre de trois ou 4 personnes qui senfonçaient dans la nuit, et cela quelques minutes après avoir entendu les coups de sifflets. Je me suis alors hâté de rejoindre la grille.
Nous commandons 4 plats de sosoa et après avoir pris la nôtre nous en emportons deux à lhôpital. Il est 7 heures et tout le village est déjà levé depuis plus dune heure.
Arrivé à lhôpital, nous constatons que maman vient juste de se réveiller et ma sur de sortir de la douche. On commente dans la chambre lalerte de la veille, peu après on se pose la question si on va effectivement sortir dans la matinée ou laprès-midi. Vers 9 heures maman me demande daller acheter une bouteille deau au village. La garde malade de Hary en profite pour me demander dacheter pour elle aussi des menakely (beignets) en me donnant 200 ariary.
Je redescends donc au village accompagné de René qui na pas trop envie de rester dans la chambre et nous achetons une bouteille deau ainsi que du Fanta et du chocolat. Maman a un péché mignon pour les chocolats. On achète aussi les beignets pour la dame qui garde Hary et qui doit être sa tante.
Au village on clôture avec des vastes toiles PK la grande place du village pour le spectacle de Rasoa Kininike laprès midi. Lorganisateur du spectacle a opté pour la place du village car la grande cour de la famille de Marie quils ont lorgnés coûte trop cher en terme de location : deux millions cinq cent mille francs soit 500.000 ariary (183 euros). Au marché cest aussi leffervescence car cest jour du grand marché hebdomadaire.
De retour à lhôpital une mauvaise nouvelle tombe : Un autre patient vient de décéder. Encore ! Cest le troisième décès en lespace de quelques jours. Cette fois-ci cest un patient qui est à la fois cardiaque et asthmatique. Les deux dames qui sont les filles du patient nont guère appréciées que leur belle-mère soit au chevet de leur père et le lui ont fait savoir en aparté, quelle doit quitter leur père et ne plus revenir. Pour ne pas alerter son époux, la belle-mère en question a dit à son mari quelle doit absolument retourner dans leur village voir leur bétails et si tout va bien là-bas. Le mari ne doit pas être dupe de lagissement de ses filles qui viennent tout juste darriver mais aussi du changement dattitude de son épouse car il a été très peiné et a pleuré selon les autres gardes-malades dans sa chambre. Peu de temps après il a fait une crise qui la conduit à une mort soudaine. Peut-être a-t-il fait un AVC ? Cest très probable.
Nous sommes plus que jamais impatients de rentrer, dautant que latmosphère à lhôpital devient glauque avec ces morts qui sensuivent à un rythme effrayant. Jen arrive même à détester ces corbeaux qui rodent autour de lhôpital, oiseau de mauvaise augure par excellence ;-(
Nous pensons tout de même que ces morts successifs ne sont pas la faute de lhôpital ni des personnels soignants, cest plutôt la faute des patients qui ne viennent se soigner ici quà un stade avancé de leur maladie, persuadés quaprès avoir tout essayé ailleurs, cet hôpital renommé ferait un miracle.
Peu après maman nous demande de porter le fisaorana au Docteur Roger sans qui le chirurgien vasculaire qui est son ami ne serait pas venu ici. Nous partons René et moi vers son bureau avec 30.000 ariary dans lenveloppe, nous allons profiter de lui demander quand maman pourra sortir car en tant que médecin chef il doit bien le savoir.
Arrivés à son bureau, cest le petit discours dusage puis, peu avant notre sortie, il nous dit que la sortie de maman se fera peu après la visite des médecins dans les chambres laprès-midi.
Nous retournons tout de suite à la chambre pour mettre au courant ma mère et ma sur afin quelles se préparent petit à petit pour ne pas être prise de court le moment venu. Dans la chambre on commence à tourner comme des lions en cage dautant plus quil ny a plus de passe temps possible, les livres et journaux ont tous déjà été lus et même relus depuis samedi après-midi. Ma sur, son mari et moi sortons sur la galerie pour prendre un peu de soleil, à peine sommes assis que des hommes passent avec un corps emballé entièrement dans un lamba (linge de la taille dun drap avec lequel les autochtones ont lhabitude de senvelopper et dont ils ne se séparent que pour travailler) en petits carreaux violets et blancs dans les bras. Cest sûrement lhomme décédé aujourdhui, près de la grille un peugeot 404 attend le corps.
Je laisse ma sur et mon beau-frère à leur bain de soleil et je déambule de la galerie extérieure à la galerie intérieure pour me changer un peu les idées, jarrive presque devant la chambre des tuberculeux lorsque je vois un homme très décharné en sortir, lair de rien je presse un peu plus mon pas en passant devant en retenant ma respiration, ma sur qui maperçois 20 m devant en rit, elle sait pertinemment pourquoi je passe vite comme ça, un peu comme si javais le diable à mes trousses. Ma sur sait très bien que je suis un peu hypocondriaque sur les bords.
Il est un peu plus de midi lorsque nous descendons Réné et moi au village pour les commandes du déjeuner.
(A suivre)